L'Étage du dessous

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En rentrant chez lui, Patrascu perçoit derrière une porte au deuxième étage de
son immeuble les bruits d'une violente dispute amoureuse.
Quelques heures plus tard le corps d'une femme est découvert. Ses soupçons
se portent sur Vali, le voisin du premier.
Et pourtant Patrascu ne se rend pas à la police... même lorsque Vali commence
à s'immiscer dans sa vie et dans sa famille

Vos commentaires et critiques :

 

Allez savoir pourquoi, le lâche n'a pas souvent bonne presse au cinéma… Dès que la caméra scrute la face livide et cireuse du lâche, c'est toujours pour en dire du mal ! D'où l'originalité, la rareté, l'humanité de L'Étage du dessous, film peu spectaculaire, malaisé à saisir, dénué de toute démagogie morale, mais qui insinue dans le ressenti de son spectateur une tension dérangeante, croissante, pénétrante. L'idée-force de Radu Muntean, c'est de ne pas lui faire raser les murs, à son lâche, mais de le cadrer bien au centre de l'écran. De ne pas l'écraser de savants jeux d'ombres mais de l'éclairer d'un jour lumineux de printemps roumain. De ne pas le perdre dans des décors oppressants mais de l'installer dans la quiétude d'un agréable appartement bucarestois. Au centre, donc, Sando Pătraşcu … Son acte de lâcheté fondateur, quel est-il ? Là encore, Muntean a la subtilité de ne pas accabler son héros. Vous avez promené votre chien. Il faisait beau. Vous passez devant la porte d'un appartement, un étage sous le vôtre. Des cris. Un couple qui s'engueule parce qu'il se sépare. Un bruit sourd. Silence. Mais les criaillements reprennent. L'homme sort du logis, vous toise. Un bref salut. Vous continuez à grimper l'escalier. Aucun spectateur de L'Étage du dessous, devant cette scène tranquille filmée tranquillement, ne peut certifier en son for intérieur qu'il aurait agi autrement que Pătraşcu. Mais l'hésitation se mue en culpabilité quand est diffusée la nouvelle que la jeune voisine de l'étage inférieur a été retrouvée morte chez elle, quelques heures plus tard. Pourquoi Pătraşcu ne témoigne-t-il pas devant la police ? Puisque le personnage ne dit rien, même à nous, se mure dans sa modeste respectabilité, puisque la mise en scène sciemment lisse de Muntean ne diffuse guère d'indices, il faut supposer. Honte de ne pas être intervenu ? Réticence peureuse à impliquer un voisin, car l'homme de l'escalier se révèle habiter l'immeuble, lui aussi ? Ou simple refus pusillanime de prendre part, même de loin, à un vrai fait divers de la vraie vie ?  Cette question, le présumé coupable, Vali, qui continue à vaquer à ses occupations mais se sait sous le coup d'une possible dénonciation, se la pose et n'ose pas la poser à Pătraşcu, dans une tension d'obédience dostoïevskienne. Comment le malaise se répand-il ? Parce que toute réponse est différée. Ce que l'on voit à l'écran, c'est un portrait moral à petites touches diffuses. Qui est Pătraşcu ?… À l'écran, souvent en temps réel, car c'est le génie de la nouvelle vague roumaine, des scènes de presque rien. Un employé qui tamponne… Une voiture qui prend une file… Des logiciels dont on égrène les noms incompréhensibles… La sœur de la défunte qui, geste stressant à souhait, tente de saisir une enveloppe dans une boîte aux lettres dont la clef ne fonctionne plus… Et pourtant, insensiblement, Pătraşcu évolue…