Discount -12

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Pour lutter contre la mise en place de caisses automatiques qui menace leurs emplois, les employés d'un Hard Discount créent clandestinement leur propre « Discount alternatif », en récupérant des produits qui auraient dû être gaspillés…

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C'est une sorte de conte de Noël truculent, anar et jubilatoire. Particulièrement pertinent et réjouissant à l'heure du travail précaire (rappelez-vous, c'est Laurence Parisot, l'ex-patronne du MEDEF qui avait osé déclarer : « le travail, comme l'amour, est précaire »), du chômage de masse et des désillusions politiques. Un belle transposition de la légende de Robin des Bois, sans château ni forêt, où on ne sait même plus qui sont l'affreux shérif de Nottingham et ses sbires puisqu'ils ont le visage anonyme des actionnaires des grands groupes qui paupérisent de plus en plus les salariés pour garantir leurs dividendes.

Ici point de Petit Jean ni de moine vengeur ou d'archer au grand cœur, mais des héros du quotidien, de simples employés d'un supermarché discount du Nord de la France, une de ces surfaces low cost où des consommateurs pauvres achètent à bas prix, parce que des salariés pauvres y travaillent pour des bas salaires dans des conditions de plus en plus aléatoires. Salaire minimum, temps partiel, horaires décalés qui ruinent la vie de famille – ou la vie sans famille d'ailleurs –, tâches répétitives, ingrates et chronométrées, hiérarchie de fer et flicage sur le mode diviser pour mieux régner… Des gars et des filles de tous âges, qui tiennent parce qu'il faut continuer à faire bouillir la marmite familiale. Qui tiennent aussi parce que, entre les rayons ou même sur le bitume du parking où l'on arrose de détergent les produits périmés pour éviter que d'autres pauvres ne les barbotent, la chaleur humaine entre collègues est encore là.

Mais quand la direction, toujours soucieuse d'optimiser les profits, annonce une vague de licenciements suite à l'installation de caisses automatisées, c'est la goutte d'eau. Un petit groupe d'employés, refusant de se résigner, écartant l'idée d'une grève perdue d'avance, décident de prendre le taureau par les cornes, de se payer sur la bête une prime de licenciement légèrement majorée, tout en faisant profiter de leur acte de légitime défense d'autres précaires du coin : ils vont chouraver, progressivement pour ne pas se faire gauler, divers produits de première ou deuxième nécessité pour alimenter une épicerie solidaire clandestine. Ils pratiquent le court-circuit du profit au service du circuit court pour les démunis. Bien mieux que les banques alimentaires ou autres manifestations de charité venues d'en haut !

Grâce à un récit alerte et à des acteurs épatants, on suit avec un vrai plaisir cette joyeuse mutinerie dans la grande distribution. Mais même s'il choisit le parti de la fantaisie plutôt que celui de l'analyse, le film est d'une grande justesse quand il décrit les conditions de travail de ces employés de grandes surfaces, les techniques managériales malsaines imposées bon gré mal gré aux gérants de supérettes (le personnage de la directrice, incarnée par Zabou Breitman, est d'ailleurs montré comme une victime enfermée dans un système plutôt que comme un monstre patronal), le rôle des petits flics et autres vigiles qui font du zèle sur le dos de leurs collègues en difficulté. Mais a contrario, et c'est là qu'il gagne définitivement la partie, Discount exalte avec une chaleur non feinte la force de la solidarité, de l'action collective.

S'il y a des moralistes pour trouver que quand même, cette histoire est une incitation à la fauche, on ne les prendra pas suffisamment au sérieux pour leur asséner la formule de Pierre-Joseph Proudhon… Pour tous les autres, un conseil d'ami : venez rigoler avec Discount, ça ne peut pas vous faire de mal !