Les Mille et une nuits - volume 2 : le désolé

Où Schéhérazade raconte comment la désolation a envahi les hommes : « Ô Roi bienheureux, on raconte qu'une juge affligée pleurera au lieu de dire sa sentence quand viendra la nuit des trois clairs de lunes. Un assassin en fuite errera plus de quarante jours durant dans les terres intérieures et se télétransportera pour échapper aux gendarmes,
rêvant de putes et de perdrix. En se souvenant d'un olivier millénaire, une vache blessée dira ce qu'elle aura à dire et qui est bien triste ! Les habitants d'un immeuble de banlieue sauveront des perroquets et pisseront dans les ascenseurs, entourés de morts et de fantômes, mais aussi d'un chien qui… ». Et le jour venant à paraître, Schéhérazade se tait.

- « Quelles histoires ! C'est sûr qu'en continuant ainsi, ma fille va finir décapitée ! » – pense le Grand Vizir, père de Schéhérazade, dans son palais de Bagdad.

Vos commentaires et critiques :

Il fallait être un peu fou et, disons-le, génial pour concevoir et réussir un projet aussi fascinant que ces Mille et une nuits : en un film fleuve, sans équivalent dans l'histoire du cinéma, décrire l'état du Portugal actuel au travers d'un assortiment d'histoires hétérogènes – fiction flamboyante, documentaire méticuleux, farce, tragédie, fait divers, etc. – toutes liées par une foisonnante narration. La colonne vertébrale de tous ces récits est inspirée de la structure des fameux contes arabes. Ils sont ici librement transposés pour relater divers événements ayant eu lieu au Portugal entre l'été 2013 et l'automne 2014, alors que le pays souffrait de problèmes économiques dévastateurs. La beauté de cette œuvre monumentale est de rendre compte des désastres sociaux et humains provoqués par la crise et, en même temps, d'en unir chaque fragment dans un élan de fiction réparatrice, une poésie jubilatoire jetée par dessus les politiques d'austérité. Hautement militant à sa manière, Les Mille et une nuits se fait l'antidote du marasme économique en s'ancrant dans des histoires populaires qui célèbrent la vivacité de toute une culture. Comme si le pays se trouvait vengé de la troïka européenne en rendant aux gens leur fantaisie, leur élégance, leur dignité et même leur tristesse…