Cassandro the exotico ! TP

Après 26 ans de vols planés et d'empoignades sur le ring, Cassandro, le roi des Exoticos – ces catcheurs gays qui dynamitent les préjugés – est incapable de s'arrêter. Le corps en miettes, pulvérisé, il va pourtant devoir se réinventer…

Forum,Prix Louis Marcorelles et Prix des Bibliothèques – Cinéma du Réel (France), Prix du Public

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Cassandro est un personnage hors du commun, un vrai héros de cinéma surprenant et captivant ! Enfant né à la frontière américano-mexicaine, maltraité et mal à l'aise avec son identité sexuelle naissante dans un pays champion de l'homophobie, Cassandro a lutté toute sa vie, au sens propre comme au figuré. Passionné dès son plus jeune âge par le sport roi du Mexique, la lucha libre – à peu de choses près le catch –, il est monté sur le ring à peine adolescent et a gravi tous les échelons. Alors que la lucha libre était le royaume des héros masqués, il a rejoint les « exóticos », ces catcheurs au visage découvert et aux tenues extravagantes singeant les clichés de l'homosexualité la plus caricaturale, et a endossé le rôle à bras le corps pour en faire une revendication identitaire. Oui les exóticos, tout homosexuels qu'ils étaient ou qu'ils paraissaient, étaient capables de battre les rudos, les hommes, les vrais ! D'ailleurs en 1991, Cassandro le pédé, la tarlouze, la fiotte, l'inverti – ou tout autre qualificatif que peuvent vomir les homophobes – est devenu champion du monde et par la même occasion un symbole qui renversait les présupposés d'un pays dominé par le machisme le plus caricatural.
Après 26 ans de combats, de vols planés, d'innombrables blessures, deux crises cardiaques, après des années sombres où il a plongé dans différentes addictions et touché le fond avant une renaissance en 2003, date à laquelle il a renoncé à tout ce qui le détruisait hors le catch, la cinéaste Marie Losier l'a rencontré à un tournant de sa vie, peut-être la fin de sa carrière, allez savoir.
Marie Losier parlons en : un autre phénomène, à 20 000 lieues du cinéma prémâché qu'on nous sert trop souvent. Marie Losier, feu follet de l'art contemporain et du cinéma expérimental, a passé une grande partie de sa vie à New York où elle a rencontré les plus géniaux des extravagants artistes et leur a tiré le portrait de toutes les façons, en peinture, en photo, en 16 mm… Parmi ses sujets : les cinéastes jumeaux Kuchar, le pape de l'expérimental Jonas Mekas, les musiciens Tony Conrad ou Alan Vega, fondateur du mythique groupe Suicide, et enfin le musicien hors normes et transgenre Genesis P.Orridge qui sera au centre de son premier long métrage, The Ballad of Genesis and Lady Jaye.
Cassandro, the exotico ! est avant tout une merveilleuse histoire d'amitié, parfois intense, parfois contrariée, quand les vieux démons et le doute emportent Cassandro. Loin d'un portrait formaté, loin d'un film démonstratif ou militant sur l'homosexualité affirmée, Cassandro est un film universel sur le tournant de la vie d'un homme au parcours incroyablement riche : on le voit dans tous ses états, on le voit faire rêver les enfants autour d'un ring quand il virevolte avec une aisance surnaturelle malgré ses années de souffrance, on le voit dans son intimité, avec son lourd passif familial, avec ses croyances religieuses aztèques et son identité indienne qu'il retrouve, mais aussi ses doutes et ses souffrances, alors que son corps n'est qu'un incroyable puzzle de blessures.
Avec la question sous jacente : Cassandro, qui n'a vécu toute sa vie qu'en habit de lumière, devra-t-il raccrocher le costume et retrouver Saúl Armendáriz, son identité officielle ?