Sentinelle sud

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Aux lendemains d’une opération clandestine qui a décimé son unité, le soldat Christian Lafayette est de retour en France. Alors qu’il essaie de reprendre une vie normale, il est bientôt mêlé à un trafic d’opium pour sauver ses deux frères d’armes survivants. La mission dont ils sont les seuls à être revenus n’était peut-être pas celle qu’ils croyaient.

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Le mythe du retour du héros, la difficulté de retrouver le monde normal quand on découvre que la vie correspond rarement à ce que la vie est réellement... Le Christian Lafayette de Mathieu Gérault dans Sentinelle sud  est plutôt un antihéros. Christian est un soldat de l’armée française de retour au pays après une mission en Afghanistan qui se retrouve comme ses camarades face à tous les problèmes que pose la réinsertion : trouver un travail, chasser les fantômes, alcoolisme, dépendance à différentes substances, stress post-traumatique. L'ensemble invoque immédiatement pour le spectateur les incursions du cinéma nord-américain dans ce genre particulier relatives à la Guerre du Golfe, à celle d'Afghanistan et, pour la génération précédente, au traumatisme du Vietnam, qui a inspiré les cinéastes les plus talentueux. Gérault a dit avoir pensé au cinéma de Sidney Lumet en faisant ce film noir mâtiné de drame social ainsi que de film d’action (c'est ce qu'il arrive quand quelqu’un conserve chez lui un M16). Sentinelle sud, effectivement tourné dans le style américain des années 1970 le plus rigoureux, fait également écho à des films plus récents, comme Démineurs, Dans la vallée d'Elah et American Sniper, mais avec une touche de polar français. Ne vous attendez pas cependant à des scènes de guerre. Ici, on parle de "l’après" (et le film a été tourné entre Lyon et la Rochelle), ou plutôt de la reconstitution de ce qui s’est vraiment passé au cours de l’opération clandestine finie en embuscade qui a décimé l’unité Carmin, menée par un commandant aussi ambigu que charismatique surnommé Le Père (Denis Lavant, le comédien qui porte à jamais l'étiquette d'acteur fétiche de Leos Carax). Sur la plaque commémorative qui rend hommage aux soldats qui ont péri, on lit une date, celle du 18 août 2008 – le réalisateur se réfère ici à l’embuscade organisée par les talibans à l'est de Kaboul où sont morts dix soldats français. Dans le film (et non selon la réalité historique), derrière ce massacre (où ont également été tués des enfants afghans), il y a un trafic d’opium qui va impliquer, en France, les personnages centraux et une famille de tsiganes.
Le Canadien Niels Schneider (révélé à l'âge de 20 ans dans J’ai tué ma mère puis Les Amours imaginaires de Xavier Dolan ; plus récemment vu face à Charlotte Gainsbourg dans Suzanna Andler  de Benoît Jacquot) incarne parfaitement le soldat tourmenté avec un "regard de chiot", pour reprendre la description sarcastique de son compagnon d’armes musulman Mounir, interprété par un Sofian Khammes (Arthur Rambo ) qui vole par moments la vedette à Schneider pour sa prestation passionnée, même si le scénario (écrit par le réalisateur avec Nicolas Silhol et Noé Debré) lui confie la mission trop lourde de servir de témoin de la conscience salie de la France en matière d’intégration, à travers des dialogues trop forcés. Lafayette protégera jusqu’au bout Mounir et Henri, leur camarade le plus traumatisé, et trouvera l’amour dans les bras de la doctoresse enceinte qui s’occupe de Henri (India Hair, La Ligne ). Tout en restant dans le cadre du cinéma de genre, dans son premier long-métrage, Mathieu Gérault aborde des questions qui ont profondément marqué notre époque et nous rappelle quelles plaies incurables la guerre inflige et quels effets collatéraux elle cause.  Cineuropa