La Prunelle de mes yeux

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Une fille, un garçon. Elle aime la musique, lui aussi (mais pas la même). Ils se détestent, ils se croisent sans cesse. Et surtout : elle est aveugle, il voit parfaitement. Un jour, par provocation, il se fait passer pour aveugle auprès d’elle. Ce qui n’était qu’une mauvaise blague dure, l’amour arrive, la situation se complique, et la supercherie va devenir explosive.

Vos commentaires et critiques :

Certains l'aiment chaud

La fantaisie comme remède à la morosité, à la léthargie saisonnière, à la lourdeur festive obligatoire, c'est le propos et le programme de La Prunelle de mes yeux, comédie alerte qui joue au chat et à la souris avec les codes du genre, les respectant juste ce qu'il faut pour qu'on soit bien à l'aise dans nos repères et les bousculant suffisamment pour qu'on ne s'endorme pas dans les habitudes.
Le canevas est bien connu : deux êtres, plutôt singuliers, qu'a priori tout oppose et qui s'évertuent durant une bonne partie du film à faire croire qu'ils se détestent… avant évidemment de tomber amoureux, en passant bien sûr par toutes les maladresses imaginables dans la naissance d'une relation, y compris d'énormes mensonges dans lesquels on s'enfonce plus rapidement qu'une botte en caoutchouc dans la lande irlandaise. Des situations fatalement cocasses voire hurluburlesques. Des seconds rôles irrésistiblement improbables. Et évidemment un dénouement optimiste et joyeux, je ne vous gâche pas le plaisir de la surprise, ça fait partie de la convention incontournable et c'est très bien comme ça.
Ici la fille, Élise, et le garçon, Théo, ont vraiment tout pour ne jamais se rapprocher et donc absolument tout pour s'aimer. Elle est petite brune, sociable et pétillante, aimant la musique classique, elle en a fait son métier… Et par ailleurs elle est aveugle. Il est grand blond, ronchon voire asocial, et avec son frère il est musicien de rebetiko (et même arrière petit-fils de la bien réelle Maria Papagika, la grande prêtresse, la Billie Holiday du rebetiko), cette musique populaire grecque lancinante et triste qui ferait passer le fado ou le flamenco pour de la pop guillerette. Et il bénéficie pour sa part d'une vue parfaite. Ils sont voisins et ils trouvent toujours le moyen quand ils se croisent dans l'ascenseur de se chercher querelle, pour les prétextes les plus divers et les plus futiles.
Et puis un jour Théo lance en boutade à Élise que lui aussi est devenu aveugle ! C'est le début d'un incroyable quiproquo où le garçon va devoir jouer le jeu imposé par son mensonge maladroit. La Prunelle de mes yeux est ici dans la tradition de ces comédies hollywoodiennes dans lesquelles le travestissement ou le mensonge le plus incroyable embarquent les personnages dans des péripéties inattendues dont la seule certitude est que l'amour sera finalement au rendez-vous. On pense à Certains l'aiment chaud, qui voyait Tony Curtis et Jack Lemmon travestis par obligation devenir les confidents de Marylin, ou encore à Victor Victoria ou Tootsie.
Mais le mensonge, une fois découvert, sera-t-il pardonné ? Autre tradition hollywoodienne, les seconds rôles savoureux : un conseiller Pôle Emploi en totale empathie, malgré leurs projets cocasses, avec les allocataires forcément attachants que sont les frères Papagika ; un inénarrable rocker de café du commerce incarné avec un flegme tordant par le réalisateur Serge Bozon ; un patron de cabaret grec autoritaire parfaitement hilarant…
Au final une comédie drolatique et malicieuse, légère et pleine de trouvailles, une réussite pas si fréquente dans le cinéma français actuel où le rire se fait souvent gras et indigeste.