Les Gardiennes TP

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1915. A la ferme du Paridier, une mère et sa fille ont pris la relève des hommes partis au front. Travaillant sans relâche, leur vie est rythmée entre le dur labeur et les rares retours des hommes en permission. Hortense, la doyenne, engage une jeune fille de l'assistance publique pour les seconder. Francine croit avoir enfin trouvé une famille...

Vos commentaires et critiques :

Ernest Pérochon – quasiment oublié de nos jours alors même qu'un autre de ses romans, « Nêne », a obtenu le Prix Goncourt en 1921 – était un instituteur des Deux Sèvres qui, comme des millions d'hommes, fut mobilisé pendant la première Guerre Mondiale. Sa chance fut finalement d'être victime d'une crise cardiaque après qu'un ami fut frappé par un obus à ses côtés, ce qui lui permit d'être retiré du front et de commencer à se consacrer à l'écriture. C'est en 1924 qu'il écrivit Les Gardiennes, un roman en hommage à celles dont on parlait peu à propos de la Grande Guerre, alors que fleurissaient les mémoires des combattants : les femmes, qui avaient tenu à bout de bras, souvent dans des conditions à peine imaginables, la France des champs et des usines pendant que les hommes mobilisés mourraient par milliers dans les tranchées de Picardie ou de Lorraine.
Les Gardiennes nous transporte donc en 1915 et nous plonge dans le quotidien de la Ferme charentaise du Paridier, tenue par Hortense (Nathalie Baye) et sa fille Solange (Laura Smet)… Le quotidien est rythmé par le labeur harassant dans les champs, par les tâches pénibles qui autrefois incombaient aux hommes et par la terrible attente des nouvelles du front. Les femmes redoutent plus que tout les visites du maire, qui annoncent souvent le pire, et ne peuvent s'empêcher d'espérer les trop rares et trop courtes permissions qui leur ramènent pour quelques heures les deux fils de la famille, Georges et Constant, ou le mari de Solange, le taciturne Clovis.
Pour répondre aux exigences de la ferme, Hortense va accepter de prendre avec elle la jeune Francine, une orpheline de l'Assistance Publique qui se fait rapidement une place dans la famille par sa ténacité au travail et qui va se rapprocher peu à peu de Georges. Mais l'arrivée en 1917, via Saint-Nazaire et La Rochelle, des premiers soldats américains, fringants et souvent à l'aise financièrement, va peut être changer le destin de la Ferme du Paridier et de ses femmes…
De la même manière qu'il s'était intéressé à la communauté des moines de Thibérine dans le splendide Des hommes et des dieux, Xavier Beauvois s'attache ici à la communauté de ces femmes soudées par la nécessité de survivre, loin des champs de bataille qui leur confisquent leurs hommes. Comme toujours Beauvois a su choisir des actrices magnifiques, emmenées par Nathalie Baye (qu'il avait déjà dirigée dans Le Petit lieutenant, avec un César à la clé) et Laura Smet, qui incarnent à la perfection ces deux femmes ambivalentes, pas faciles, pas forcément sympathiques mais d'une force, d'une détermination incroyables. Et bien sûr, à travers le destin des femmes se démenant comme elles peuvent à l'arrière, le film évoque la cruauté du sort réservé à tous les hommes broyés par cette absurde tragédie que fut la « grande Guerre », traumatisme majeur du vingtième siècle.