El Club -12

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Quatre hommes vivent dans une maison isolée au bord de la mer. Chacun d'eux a un péché à expier, et ils sont placés sous la direction d'une concierge. Lorsqu'un cinquième homme arrive, il réveille les péchés enfouis par les quatre précédents.

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Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs 

Après sa trilogie ultra-lucide et dérangeante, tant dans le propos que dans la forme, sur les années Pinochet (Tony Manero, Santiago 73 post mortem, No), l'excellent Pablo Larraín s'attaque ici à une autre institution qui a pesé (pèse encore ?) de tout son poids sur l'histoire du Chili : l'Église. Laquelle, autant vous le dire d'emblée, en prend pour son grade car ce nouveau film est aussi captivant et décapant que les précédents. C'est un fait divers et un petit article sur une maison appartenant au Vatican et destinée à des curés ayant maille à partir avec la justice qui ont inspiré au réalisateur cet apologue brillant, grinçant et tragicomique. Nous sommes quelque part en Patagonie, dans une petite station balnéaire de la Côte Pacifique. Les premières images montrent l’entraînement sur la plage d'un lévrier que son maître fait courir en cercle, obstinément, jusqu'à l'épuisement. Puis l'homme et son chien rejoignent une étrange maison où vivent trois autres hommes d'un certain âge et une femme qui semble diriger tout ce petit monde d'une main de fer. On comprend peu à peu que cette étrange communauté est en fait composée de prêtres et d'anciens prêtres, reclus là bon gré mal gré, loin de leur ancienne paroisse. Tout ce petit aréopage cohabite tant bien que mal dans un relatif relâchement. Certains ne sont pas franchement réticents à un petit verre, et tous, y compris la sœur qui les surveille, se passionnent pour les paris sur les courses de lévriers. Jusqu'au jour où arrive un envoyé du Vatican, accompagné d'un nouveau pensionnaire qui viendra se suicider et sera malgré lui le déclencheur d'une succession d'événements qui vont faire basculer la maison et toute la petite ville dans le chaos et la psychose. C'est aussi un étrange personnage qui vient régulièrement hurler sous les fenêtres de la communauté, évoquant de manière très crue les relations sexuelles que lui ont imposées des prêtres par le passé. Des révélations qui vont conduire l'émissaire du Vatican à enquêter et à vouloir remettre de l'ordre coûte que coûte… Ce que montre remarquablement Pablo Larraín, qui s'est inspiré de scandales bien réels dans l’Église d'Amérique latine, c'est non seulement la manière sidérante dont celle-ci isole ses brebis galeuses (ici ce sont autant des pédophiles et des escrocs que d'anciens complices des crimes de la dictature) pour les protéger de la justice et surtout des médias, mais aussi à quel point la priorité des curés, mêmes rénovateurs et moralistes, est de protéger l'institution, même si cela doit passer par le crime. Le virtuose Larraín installe de main de maître un univers oppressant, peuplé de personnages troubles et troublants, avec en premier lieu cette religieuse apparemment bienveillante mais qui, pour se protéger, peut se révéler glaçante de violence et de machiavélisme. La sensation de malaise est renforcée par une mise en scène étouffante, une image granuleuse et voilée : Pablo Larraín s'est efforcé de filmer à l'aube ou au crépuscule avec des lentilles des années 80 pour donner à son image une tonalité opaque, monochrome  et étonnante. Le fond et la forme s'associent formidablement ici jusqu'à un climax final inquiétant au possible, et on se dit que le bon Pape François a du pain sur la planche !