Albatros

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Laurent, un commandant de brigade de la gendarmerie d’Etretat, prévoit de se marier avec Marie, sa compagne, mère de sa fille surnommée Poulette. Il aime son métier malgré une confrontation quotidienne avec la misère sociale. En voulant sauver un agriculteur qui menace de se suicider, il le tue. Sa vie va alors basculer.

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Même si comparaison n’est pas raison, et même si Xavier Beauvois en a marre paraît-il qu’on ramène toujours sa filmographie au multi-récompensé Des hommes et des dieux, on ne peut s’empêcher de penser que le sous-officier de gendarmerie d’Albatros, superbement incarné par Jérémie Rénier, témoigne de cette abnégation, de ce sens du devoir, de cette empathie naturelle que les moines de Tibérine manifestaient dans l’exercice de leur sacerdoce au cœur de la Kabylie…
Mais revenons à ce très beau Albatros qui nous occupe aujourd’hui. Nous sommes à Etretat, petite ville côtière bien connue des touristes et des fans d’Arsène Lupin. Mais ce n’est pas la Normandie balnéaire qui intéresse Beauvois – parfait connaisseur du coin depuis qu’il s’y est installé il y a un bail. On va suivre Laurent, qui commande la brigade de gendarmerie locale. C’est un sous-officier attentif, consciencieux, bienveillant, qui s’apprête par ailleurs à épouser sa compagne et mère de sa fille après plusieurs années de vie commune paisibles et heureuses. Rien d’extraordinaire donc, au contraire. Beauvois s’attache à décrire sans esbroufe le travail quotidien des gendarmes et par là même la face cachée de cette petite ville de bord de mer et de ses environs, entre misère sociale, familles à la dérive et autres « faits divers » tristement banals : suicide au pied des falaises, affaires de violences familiales, alcoolisme qui cache souvent une profonde détresse… On s’attache en particulier à un jeune paysan croulant sous le poids des dettes et des contraintes sanitaires, qu’on voit peu à peu lâcher prise et passer du désarroi au désespoir, sans que ses proches – dont Laurent, qui le connait depuis toujours – puissent véritablement l’aider…

Laurent et ses collègues font leur boulot avec empathie, compréhension, dans le respect de la loi mais en sachant adapter la règle aux circonstances et aux êtres humains à laquelle elle s’applique, exemple d’une force de l’ordre de proximité que Laurent incarne d’autant mieux qu’il est un enfant du pays et qu’il fait pleinement partie de la communauté locale. En s’attachant au fil du récit à ce personnage de gendarme, on pense forcément au Petit lieutenant, film réalisé par Beauvois en 2005, qui décrivait la découverte du travail de police à Paris par un jeune lieutenant tout fraîchement arrivé de sa province natale. Mais un événement tragique, qu’il n’a pas vu arriver, va briser Laurent, et remettre en cause la confiance que sa communauté a placée en lui…

La grande réussite de Xavier Beauvois est de faire exister à l’écran ces gens ordinaires, ces gens de peu, ces héros modestes du quotidien, leur tourments, leurs espoirs, leurs faiblesses, leur courage, leur grandeur. Il le fait avec une grande précision et une modestie bienvenue – ce qui ne l’empêche nullement de mettre du souffle et de l’ampleur dans toute la partie maritime du film.