La Vraie famille

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Anna, 34 ans, vit avec son mari, ses deux petits garçons et Simon, un enfant placé chez eux par l’Assistance Sociale depuis l’âge de 18 mois, qui a désormais 6 ans. Un jour, le père biologique de Simon exprime le désir de récupérer la garde de son fils. C’est un déchirement pour Anna, qui ne peut se résoudre à laisser partir celui qui l’a toujours appelée « Maman ».

Vos commentaires et critiques :

Si Diane a les épaules, le premier film de Fabien Gorgeart nous mettait déjà la puce à l’oreille, son second confirme l’avènement d’un grand réalisateur qui excelle dans l’art subtil de n’enfermer aucun de ses protagonistes dans des cases étroites et stéréotypées. Ici point de coupable tout désigné, ni de victimisation. C’est un regard aussi lucide que modeste qui questionne, résolument bienveillant sans tomber dans une béatitude benoîte. Et s’il faut sortir rassasiés de chaleur humaine et le cœur en capilotade, autant que cela soit entre les bras de Mélanie Thierry qui interprète ici l’un de ses rôles les plus puissants, joyeusement bouleversant. Tous les personnages, du plus présent au plus discret, ont de l’étoffe, une ampleur généreuse. C’est beau, saisissant, solaire et ce n’est même pas la peine de préciser que le gros du récit est tiré d’une histoire vraie, celle du réalisateur, cela se vit, cela se sent.
Plongée dans une famille heureuse, dans le quotidien équilibré de gens qui s’aiment et aiment la vie. Les rares chamailleries entre frangins sont vite oubliées… Driss, le père (Lyes Salem, juste parfait), tantôt avec une bonhommie non feinte, tantôt sous des dehors d’observateur taiseux, remet alors un peu d’ordre dans tout cela. Il est l’exemple même de l’homme pondéré, de la force tranquille. Quant à Anna (Mélanie Thierry, sublime donc), elle est une mère si joviale, au sourire si craquant qu’il est difficile de bouder longtemps. Entre leurs trois enfants, malgré les différences d’âge, règne la connivence solidaire de ceux qui grandissent dans un sentiment d’équité. Tous sont câlinés à la même enseigne, tous sont écoutés avec la même vigilance.
Pourtant on va vite percevoir une légère et assez incompréhensible différence de traitement vis-à-vis du petit dernier, Simon (Gabriel Pavie, impressionnant de spontanéité). Pourquoi par exemple, dans cet entourage parfaitement agnostique, Anna se sent-elle obligée d’astreindre l’enfant à des temps de prière pendant que les autres font un parcours d’accrobranche ? Patiemment, doucement, elle lui explique à demi-mots : « Tu sais bien que pour toi ce n’est pas tout à fait pareil… ». Pourquoi ? Le décor est planté, ce qu’il dissimule, on peinera à le deviner, jusqu’à ce que les choses se dévoilent par touches délicates…
On pourrait en dire plus, mais ce serait dommage… Anna, tout comme l’héroïne du précédent film de Fabien Gorgeart, a des épaules suffisamment solides pour porter à bout de bras toute sa petite tribu, la protéger comme une louve jalouse. Un peu trop peut-être diront certains ? La critique est si facile… Toujours est-il que bientôt elle se retrouvera face à une réalité cornélienne dont elle se serait volontiers passée et qui n’épargnera personne.
On a beau avoir la sagesse, savoir qu’on n’élève jamais un enfant pour soi-même mais pour lui permettre de s’envoler un jour loin du foyer, les sentiments l’emportent sur la raison. Il est alors terriblement douloureux de se rappeler qu’aimer l’autre, c’est parfois accepter de le laisser partir…