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Elisa, kinésithérapeute, part s'installer avec son jeune fils, Noé, à Dunkerque, ville où elle est née sous X. Quelques mois plus tôt, elle y a entrepris des recherches sur sa mère biologique, mais cette femme a refusé de dévoiler son identité. À la recherche d'une mère inconnue, de son passé et de leur histoire, Élisa ne renonce pas et veut comprendre... Le hasard va bouleverser ses attentes.

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Deux femmes douces

 Nous avions découvert Ounie Leconte, réalisatrice née en Corée avant d'être adoptée à l'âge de neuf ans par une famille française, avec Une vie toute neuve (2010), un film bouleversant inspiré de son expérience à l'orphelinat avant de rejoindre la France. Son nouveau et très joli film questionne encore la construction de l'identité familiale. Comment vit-on quand on ne connaît pas ses parents biologiques ? Comment accepte-t-on d'avoir été abandonné(e) par sa mère ? Comment assume-t-on cette absence d'histoire familiale, de repères ?

Elisa est une jeune femme dont on peut dire qu'elle est en train de réussir sa vie, elle est masseur kinésithérapeute, elle a un enfant merveilleux, Noé… Seul bémol : elle est en train de se séparer de son mari Alex, sans heurts, sans cris, apparemment sans regrets. Mais le vrai bouleversement, c'est qu'elle vient de prendre une décision importante : quitter Paris pour venir s'installer à Dunkerque où elle est née dans une maternité désormais fermée, dans le cadre d'un accouchement sous X. Les choses sont claires dans son esprit, elle veut retrouver la trace de cette mère qui n'a pas souhaité depuis trente ans qu'elle connaisse son existence. Le chemin est long et semé d'embûches : l'administration est là pour protéger l'anonymat souhaité par la mère, Elisa devra faire une lettre à sa génitrice inconnue pour tenter de la convaincre de se dévoiler. Elle va aussi essayer de prendre contact avec les sage-femmes à la retraite qui l'ont vu naître…

Mais c'est le hasard qui va la mettre – sans qu'elle le sache – sur le chemin de cette femme tant espérée. Annette est femme de service dans la cantine de Noé et, souffrant de douleurs professionnelles, elle va venir consulter la kiné Elisa. Les deux femmes vont-elles, par la proximité physique, se reconnaître ? Est-ce qu'à travers les années une mère reconnaît spontanément sa fille et réciproquement ? Est-ce qu'une grand-mère peut reconnaître, dans les yeux d'un enfant, le regard d'un homme disparu ?

Ounie Leconte, avec une grande sensibilité, avec une infinie délicatesse, filme en parallèle les vies de cette fille et de cette mère qui diffèrent en tout (Elisa est une Parisienne d'un milieu plutôt aisé, qui croit maîtriser sa vie et ses émotions, Annette est d'un milieu populaire et a toute sa vie enfoui ses secrets et ses regrets) et elle tisse pas à pas les les fils de cette histoire distendue. Une histoire qui reflète une époque où l'on préférait se débarrasser des enfants de l'amour quand ils étaient le produit d'une union prétendument inconvenante.

Le film est porté par deux remarquables actrices : Céline Sallette, figure de plus en plus importante du cinéma d'auteur français, qui sait combiner détermination et fragilité, et Anne Benoît, splendide comédienne trop rare au cinéma, parfaite pour incarner cette modeste employée qui va enfin laisser ses sentiments l'emporter sur la pression familiale et sociale. Ounie Lecomte, servie par la photo splendide de Caroline Champetier, exploite merveilleusement la beauté mélancolique de Dunkerque, port industriel à la fois austère et ouvert sur l'ailleurs, promesse d'une vie nouvelle (une vie toute neuve ?) pour les protagonistes. La musique magique d'Ibrahim Maalouf finit de renforcer le charme de cette chronique élégante et sensible.