Isola

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Sur une île perdue entre Afrique et Europe, Dai, une jeune chinoise enceinte, s’est échouée comme par magie. Chaque jour, elle scrute les visages des migrants qui débarquent par milliers, espérant parmi eux retrouver le père de son enfant. Tandis que le paradis insulaire se meut peu à peu en un cimetière balnéaire, Dai doit se réinventer pour survivre. Elle trouve alors refuge dans une grotte, une enclave où l’imaginaire est roi, où elle et son enfant à venir pourront peut-être résister à la violence du monde qui gronde au dehors.

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Qui est Dai, cette jeune chinoise arpentant avec ses ombrelles fleuries les rives d’Isola ? C’est sur cette île imaginaire que Fabianny Deschamps donne chair et corps à cette femme qui attend l’homme qu’elle aime et l’enfant qui naîtra de leur union ; qui se fabrique un antre, une grotte, un espace à soi. Mais sur Isola la fiction rencontre le réel. Sur ce territoire de cinéma, imaginé par la réalisatrice, accostent les bateaux de la marine italienne remplis de ceux qui risquent leurs vies pour rejoindre nos rives. Et la puissance du film permet par la fiction, de voir ces images - réelles - comme on ne les a jamais vues. La trajectoire de Dai se déploie alors avec fulgurance dans cet espace insulaire, miroir de l’enfermement de notre société. Dai s’y invente un monde à elle, avec douceur et rêverie, pour survivre. Elle prend vie, arpente les lieux où sont accueillis les réfugiés. Jamais ni ce personnage de fiction, ni la cinéaste ne s’adressent à eux et c’est là, la grande force du film, ne pas « recueillir » leurs témoignages. Ne pas archiver comme le font les autorités de façon implacable les noms, les liens, les récits. Isola nous pose la question du réel, de notre rapport à l’image, aux images de ces gens qui affluent par milliers, fuyant les guerres et la misère. Ces lieux de passage et d’accueil, une fois désertés, gardent-ils la trace de ceux qui sont venus s’y échouer ? Ont-ils même existé ? Le flux continu des images de réfugiés dans les médias, aussi dures soient-elles, ne nous les rendent pas plus réels. Et c’est la force d’Isola, de les faire exister par le cinéma, sans obscénité, et dans les yeux de Dai qui cherche dans cette foule l’homme qu’elle a perdu. L’enfant qu’elle porte est celui de nos guerres, de nos violences, l’enfant de la folie qu’il faudra aimer.