Patti Cake$

Vous aimez ce film, notez le !
La note moyenne actuelle est de 16,00 pour 1 vote(s)
Patricia Dombrowski, alias Patti Cake$, a 23 ans. Elle rêve de devenir la star du hip-hop, rencontrer O-Z, son Dieu du rap et surtout fuir sa petite ville du New Jersey et son job de serveuse dans un bar miteux.
Elle doit cependant s’occuper de Nana, sa grand-mère qu'elle adore, et de Barb, sa mère, une chanteuse ratée et totalement instable.
Un soir, au cours d'une battle sur un parking, elle révèle tout son talent de slammeuse.
Elle s'embarque alors dans une aventure musicale avec Jheri, son meilleur ami et Basterd, un musicien mutique et asocial.

Vos commentaires et critiques :

QUINZAINE DES RÉALISATEURS 2017: CLÔTURE

Rap around the clock

De l’adolescence jusque la trentaine, Geremy Jasper s’est essentiellement consacré à la musique, passant des centaines d’heures en studio avec un groupe punk, écrivant des chansons, puis les enregistrant. Il commence à tourner des clips pour son groupe, tout en découvrant le cinéma de Fellini et de David Lynch. Installé à New York, il enchaîne pubs et clips et en 2013, commence à écrire le scénario de Patti Cake$. "Je l’ai développé pendant environ trois ans et demi, écrivant une dizaine de versions successives. Et comme c’était mon premier scénario, j’y ai mis plein de chansons. Mais j’ai eu la chance inouïe d’être pris au Sundance Lab, ce qui m’a permis de recevoir des conseils de gens extraordinaires, tels que Tarantino, Patty Jenkins, Kasi Lemons, Michael Arnt. De vrais héros qui m’ont aidé à creuser les relations entre les personnages à donner une âme à mon récit." C’est son producteur qui va lui suggérer Danielle Macdonald pour incarner le rôle principal. "Dès que j’ai vu sa photo, j’ai été frappé. Elle était exactement telle que j’avais imaginé Patti, sauf qu’elle était australienne et n’avait jamais rappé. Mais c’est une comédienne incroyable qui peut tout faire. Alors j’ai passé les deux années suivantes à lui apprendre le rap." Le tournage va se dérouler principalement dans le New Jersey, terre de prédilection de Geremy Jasper. "Il a duré au total 30 jours. C’était très ambitieux parce qu’il y avait des tonnes de personnages, de scènes et de décors, le tout pour un budget très serré. Il a fallu qu’on organise de grands concerts avec des centaines de figurants, qu’on tourne des clips et qu’on mette en boîte des cascades."

Si vous êtes fan de hip hop, pas de doute, vous allez adorer Patti Cake$, ce super « feel good movie » narrant l'improbable ascension d'une jeune MC du New Jersey que rien ne prédestinait au succès. Mais si vous n'êtes pas du tout friand de cette musique de djeuns (encore que les pionniers du hip hop ont désormais largement dépassé la cinquantaine…), ne passez surtout pas à la page suivante : les aventures de la rondelette Patricia Dombrowski ont tout pour vous faire vibrer et rigoler. Il y a dans Patti Cake$ toute l'Amérique qu'on aime, celle qui croit envers et contre tout, envers et contre Trump, envers et contre toutes les inégalités qui s'accroissent… que chacun peut forger son propre son destin, que chacun peut trouver la force et l'énergie de s'affranchir de tous les obstacles… Et il faut bien dire que pour Patricia, 23 ans, ce n'est pas gagné !
Patricia est barmaid dans un pub de nuit où vient échouer tout ce que le coin compte de gros lourdauds. Ça se passe dans une ville morne et triste du New Jersey, cet État à la fois trop près et trop loin de New York, illusoire eldorado vers lequel tous les jeunes du coin rêvent de fuir. Patti souffre par ailleurs d'un incontestable surpoids qui lui attire diverses moqueries, et elle se trouve affublée d'une mère un peu trop portée sur l'alcool et l'exhibitionnisme après avoir été une vedette locale de la country. Autant dire que pour la jeune femme qui rêve de gloire dans le rap, c'est mal barré… D'autant qu'elle est blonde comme les blés et qu'elle a la peau laiteuse, pas franchement un passeport valide pour entrer dans le monde du hip hop !
Mais c'est compter sans la soif de vivre et l'immense imagination de Patti qui, malgré la grisaille de son environnement, est bien décidée à se construire un avenir, même si ça s'annonce laborieux. Elle rêve la nuit d'incroyables mises en scène bling bling de clips et aspire à rencontrer son idole O-Z, icône caricaturale du rap mégalo. Plus ou moins efficacement secondée par son copain Jheri, un DJ indo-américain à mourir de rire, elle va se révéler à elle même, surtout après sa rencontre, lors d'un tremplin musical, avec Basterd, un jeune punk noir aussi séduisant que mutique, méprisé de tous tant sa musique brutale sied mal aux gens du coin.
Si Patti Cake$ est aussi drôle qu'authentique et touchant, c'est sans doute parce que le réalisateur raconte dans le film, à travers le destin de Patricia, ce qui fut à peu de choses près le sien. Geremy Jasper, avant de tourner des clips musicaux à succès, était un jeune gars du New Jersey obligé de s'occuper de sa grand-mère partiellement impotente et rêvant de succès new yorkais. Et tout le charme de son film, porté par la prestation plus que convaincante de chacun de ses acteurs et surtout actrices (la jeune australienne Danielle Macdonald, qui a consacré deux à apprivoiser le flow du rap, est tout bonnement bluffante) est dans le regard à la fois lucide et tendre que le réalisateur pose sur ses personnages, jeunes gens ordinaires d'un coin ordinaire des États-Unis. Et dans l'optimisme sincère et contagieux de ce regard.