La Belle saison

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1971. Delphine, fille de paysans, monte à Paris pour s'émanciper du carcan familial et gagner son indépendance financière. Carole est parisienne. En couple avec Manuel, elle vit activement les débuts du féminisme. Lorsque Delphine et Carole se rencontrent, leur histoire d'amour fait basculer leurs vies.

Vos commentaires et critiques :

 

Les débuts ne sont pas tout roses et son boulot n'est pas folichon. Mais elle est libre, n'a de comptes à rendre à personne… réceptive à ce parfum décapant de printemps parisien, accessible à toutes les découvertes. Puis un jour plus beau encore que les autres, elle se retrouve à prendre la défense d'une fille qu'un mec harcèle dans la rue… et là, sa vie s'emballe, embarquée qu'elle est avec une bande de nanas délurées et rigolardes où Carole fait autorité. Carole : elle est prof, elle est lumineuse, belle à s'en taper la tête contre les murs et le cœur de Delphine n'en peut plus de battre sous l'effet d'une attirance qui lui donne toutes les audaces. Carole a un compagnon, mais très vite l'évidence s'impose : ce qui se passe entre elles est plus fort que tout, et leur engagement réciproque pour une émancipation collective des femmes les rapproche, exalte leur esprit, les jette l'une vers l'autre…

C'est une histoire d'amour superbe qui commence là et le regard que pose Catherine Corsini sur la relation des deux femmes donne à voir toute l'intensité d'une passion charnelle, filmant les corps avec une sensualité et une tendresse qui les embellit, sans voyeurisme et sans vulgarité. Libres elles sont et même leur attirance réciproque ne les fera pas renoncer à leur autonomie fraîchement gagnée…

Catherine Corsini filme juste, filme fort et son film raconte comme aucun autre auparavant ce tsunami joyeux qui venait des femmes et bousculait l'ordre établi… « J'étais celle qui attend, mais je peux marcher devant » chantait Anne Sylvestre et les filles faisaient sauter le verrou qui les privait du droit à la parole, à l'avortement et à la contraception, et à plein d'autres choses : par la force de leur mouvement collectif elles faisaient changer les lois et découvraient le rôle subversif de l'amour. Drôle d'époque dont Corsini rend formidablement la vitalité irrépressible. OXI ! C'était un non, franc et massif qu'elles opposaient à une société dominée par les hommes et encore maintenant on continue à bénéficier des acquis de ces luttes-là. Le film de Corsini, jubilatoire, emballant, est un hommage magnifique rendu à celles qui osèrent déposer une gerbe sur la tombe de la femme du soldat inconnu, parader pour le premier défilé homosexuel, signer le manifeste des 343 salopes… et pour autant que le climat de cette époque soit rendu avec une parfaite justesse, le film dégage une force et un enthousiasme qui le jette comme un pavé joyeux dans un présent un poil désespérant et rappelle que les filles ne manquent toujours pas ici et là de bastilles à prendre… tant s'en faut !