La Niña de Fuego -12

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Barbara est une belle femme vénéneuse et psychologiquement instable, que son mari tente de contenir. Damián n'ose pas sortir de prison de peur de la revoir. Luis veut la faire chanter mais ne réalise pas encore qu'il joue avec le feu. Le trio se retrouve plongé dans un tourbillon de tromperies où la lutte entre la raison et la passion tourne à la guerre des nerfs...

Vos commentaires et critiques :

On était un peu sans nouvelles du cinéma espagnol, et à vrai dire plutôt inquiets que la crise qui touche le pays ne plombe durablement la production cinématographique, dont peu de titres ont traversé les Pyrénées ces dernières années. Mais voilà qu'en cet an de grâce 2015, les bonnes nouvelles ibériques se succèdent. Alors que, sous l'impulsion de la jeunesse, le pays se renouvelle politiquement avec l'élection à la mairie de plusieurs villes importantes des candidat(e)s du mouvement Podemos, le cinéma trouve lui aussi un nouveau souffle dont témoigne l'arrivée sur nos écrans de deux films ambitieux et novateurs. Vous pouvez en découvrir un premier exemple dans nos salles depuis mi-juillet, avec le captivant polar sous influence américaine La Isla mínima. Et voici avec La Niña de Fuego une deuxième illustration de cette vitalité retrouvée. Son réalisateur, Carlos Vermut, qui est aussi illustrateur, fait preuve d'audace, jouant d'une grande beauté formelle et d'un insolent sens de l'ellipse pour tisser une histoire complexe et vénéneuse dans laquelle les différents fils s'entrelacent petit à petit. Dans ce scénario savamment construit, le danger guette en permanence, l'inquiétude rôde, et le malaise ne cesse de grandir en même temps que le mystère s'épaissit. C'est que Carlos Vermut tient sans nul doute son spectateur en haute estime : il ne lui fournit qu'une partie des clés, laissant la place au hors-champ et à l'imagination pour que chacun puisse se construire sa propre interprétation. Et son film est à l'image de son personnage féminin : énigmatique, troublant et diablement fascinant.

Luis est un professeur au chômage prêt à tout pour donner un peu de bonheur à sa fille atteinte d'une leucémie incurable. Damián fut professeur aussi, mais il s'apprête aujourd'hui à sortir de prison, avouant à ses geôliers sa peur, une fois dehors, de recroiser la route de Bárbara. Bárbara justement est une jeune femme instable et mystérieuse, que son mari psychiatre essaie tant bien que mal de contrôler. Entre ces trois personnages va se mettre en place un jeu malsain fait de chantages, de mensonges et de tromperies, un jeu bien trop dangereux et qui risque fort d'aller beaucoup trop loin…

 

« Cela s'était passé avec Victor Erice (L'Esprit de la ruche) et Ivan Zulueta (Arrebato) et cela se renouvelle avec Carlos Vermut. Ils ont tous signé un deuxième film qui est un véritable chef d’œuvre. Un film qui se bonifie avec les années dans le cas des deux premiers, avec les heures et les jours dans le cas de Carlos Vermut. Il y a beaucoup à dire sur La Niña de fuego… Vermut possède ce sens hors du commun de l’ellipse : les personnages et histoires cohabitent et évoluent dans une narration pleine de coupures, ce qui donne l’impression de quelque chose de linéaire, alors que c’est tout le contraire. C’est un grand directeur d’acteurs, tous excellents, avec une mention spéciale pour Bárbara Lennie. En tant que scénariste, il nous épate à chaque changement de séquence. Quand, dans la dernière partie, il donne l’impression qu’il n’a plus rien de nouveau à proposer, quand l’histoire semble entrer dans une impasse, quand il n'est plus possible de faire aussi bien qu’auparavant, il y parvient. Il surprend à nouveau et met un point final avec le passage où intervient Pepe Sacristán, l’acteur espagnol qui vit là son meilleur troisième acte. J’espère que le public rendra justice à La Niña de Fuego qui est, pour moi, la grande révélation du cinéma espagnol de ce siècle. » Pedro Almodóvar