Les Huit salopards -12

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Quelques années après la Guerre de Sécession, le chasseur de primes John Ruth, dit Le Bourreau, fait route vers Red Rock, où il conduit sa prisonnière Daisy Domergue se faire pendre. Sur leur route, ils rencontrent le Major Marquis Warren, un ancien soldat lui aussi devenu chasseur de primes, et Chris Mannix, le nouveau shérif de Red Rock. Surpris par le blizzard, ils trouvent refuge dans une auberge au milieu des montagnes, où ils sont accueillis par quatre personnages énigmatiques : le confédéré, le mexicain, le cowboy et le court-sur-pattes. Alors que la tempête s'abat au-dessus du massif, l'auberge va abriter une série de tromperies et de trahisons. L'un de ces huit salopards n'est pas celui qu'il prétend être ; il y a fort à parier que tout le monde ne sortira pas vivant de l'auberge de Minnie…...

Vos commentaires et critiques :

 

Quentin Tarantino, cinéphile inusable, réalisateur maniaque, a décidé de tourner Les Huit salopards, son huitième film  au format 70 mm. Précisément l'Ultra Panavision 70, utilisé pour la dernière fois au cinéma en 1966, avec Khartoum de Basil Dearden et Eliot Elisofon. Huit minutes de film supplémentaire, un montage inédit pour le format 70 mm qui diffère des versions d’exploitation en DCP numérique, puis une amorce d’ouverture où s’affiche à l’écran immense un panneau rouge avec l’inscription OVERTURE, sans la lettre U avec la musique composée par Ennio Morricone . 1h40 plus tard INTERMISSION, un entracte de 12 mn. Bref c’est à une projection à l’ancienne que nous invite Tarantino. À voir donc au Gaumont Marignan l’unique salle parisienne projetant le film dans cette version, le cinéma s’étant équipé pour l’occasion du matériel adéquat. Puis vous pouvez comparer en allant voir le film projeté en numérique dans une version de 2h47. C'est donc une version de 2h55 qui est proposée en 70mm.

 

 

Cluedo sanglant

Depuis le Code Hays des années trente, la tradition des films de « mauvais genre » à Hollywood est d’utiliser le cinéma de divertissement pour subvertir la morale et la bien-pensance. Sous ses allures de farce sadique de sale gosse, le cinéma de Tarantino est plus incisif qu’il n’y paraît, c’est de plus en plus évident à chaque nouveau film. Tout comme Scorsese, il s’attaque dans ses dernières réalisations aux fondations de la nation américaine, brocardant (avec style) l’hypocrisie de ses valeurs tout en montrant la violence et la cruauté sur lesquelles le pays s’est construit, pays raciste, sexiste et brutal, où tout commence par une prière et finit par une pendaison, mais sous le regard vénérable et bienveillant d’Abraham Lincoln. Ce n’est sans doute pas un hasard ou un caprice si pour son dernier opus, il a confié la musique originale à Ennio Morricone, le compositeur des Il était une fois…

Car ce n’est pas un Tarantino comme un autre, ou alors c’est un Tarantino comme tous les autres à la fois, synthèse particulièrement savoureuse tout en étant un film de la maturité. La distribution a quelque chose à y voir, l’ensemble le plus « tarantinesque » depuis Pulp fiction (mention spéciale à Walton Goggins dans le rôle d’un shérif capable autant de bêtise que de génie, qui gagnera sans cesse en complexité et deviendra, à sa manière, aussi marquant que les deux têtes d’affiche Samuel Jackson et Kurt Russel). On retrouve le huis clos tendu de Reservoir dogs, les excès de Django Unchained et ses raffinements stylistiques, le chapitrage d’Inglourious basterds… on a même droit à un monologue hilarant de Samuel Jackson qui n’est pas sans rappeler le « Ézéchiel 25, verset 10… » de Pulp fiction.

L’ouverture du film, ample et lugubre, magnifie la musique de Morricone, les montagnes enneigées, immaculées, découvrant peu à peu les contours d’un christ en croix recouvert d’une épaisse couche de neige, page blanche funèbre prête pour cette histoire sanglante qui débute par l’arrivée d’une diligence et le titre d’un premier chapitre plein de promesses : « Dernier arrêt avant Red Rock ».

Alors que la tempête s’abat sur les sommets enneigés, l’auberge va abriter une série de coups fourrés et de trahisons. L’un de ces huit salopards – parmi lesquels, remarquons-le, une saloparde, incarnée par l'excellente et trop rare Jennifer Jason Leigh – n’est pas celui qu’il prétend être ; il y a fort à parier qu'ils ne seront pas huit à sortir vivants de l’auberge de Minnie…

La diligence a pour passagers John Ruth (Kurt Russell), un chasseur de primes, ainsi que sa captive Daisy Domergue (Jennifer Jason Leigh). Connu pour ses principes, Ruth tient à livrer vivante sa prisonnière à la justice afin qu’elle subisse la mort par pendaison (ce qui donnera lieu à des conversations d’exégètes sur les vertus comparées d’une pendaison et d’une exécution sommaire par balle, banale et mesquine mais qui évite quelques tracas pour le transport…). Ils croisent en chemin Marquis Warren (Samuel Jackson), lui aussi chasseur de primes et détenteur d’une précieuse lettre signée par le président Lincoln lui-même. Chris Mannix (Walton Goggins), un renégat sudiste et nouveau shérif de Red Rock, se joindra au groupe alors que le blizzard, au loin, gagne en intensité. Ils décident de faire escale dans une mercerie montagnarde, mais la patronne de l’établissement n’est plus là, à sa place se trouvent quatre étrangers… Blizzard, blizzard… vous avez dit blizzard ? Alors que la pénombre et le manteau neigeux se referment sur nos huit salopards, on ne sait pas lequel (ou lesquels) d’entre eux jouera un tour pendable aux autres…