5 est le numéro parfait

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Peppino Lo Cicero, ex-tueur à gages de la Camorra est fier de son fils qui gravit les échelons du crime organisé. Mais quand celui-ci est froidement tué dans un guet-apens, il reprend du service accompagné de son ami Toto le boucher. Leur quête de vérité va déclencher une spirale de vengeances et de trahisons dans les clans mafieux du Naples des années 70.

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Les connaisseurs auront reconnu ci-dessus le nom d'Igort, dessinateur et scénariste de BD qui délaisse ici ses crayons pour passer derrière la caméra en adaptant très fidèlement son fameux roman graphique 5 est le numéro parfait qui, dès sa sortie, a été un phénomène d’édition. Publié dans 20 pays, traduit dans 15 langues et récompensé par de nombreux prix internationaux, il est devenu un livre culte, hissant son créateur au rang des auteurs importants du genre.
Aucune des propositions pour porter l'album à l’écran n’ayant abouti, Igort a fini par se prendre au jeu et réaliser lui-même ce qui est donc son premier film, incontestable réussite plastique. On savoure pleinement l’ambiance si particulière qui s’en dégage, ainsi que l'invention et la grande précision dans le travail sur les couleurs. Chaque plan semble une composition picturale qui se décline dans des noirs d’encre, des bleus de nuit, des tons sépias… Et si la mise en scène emprunte à l’art et au découpage de la bande dessinée, elle rend aussi hommage aux films noirs des années 70, période à laquelle l’action se déroule. 
Elle démarre par une nuit torrentielle, dans Naples qui semble à l’abandon, tout comme son héros qui marche sans but sur ces pavés mille fois arpentés. Car contrairement à ce que la diseuse de bonne aventure lui avait jadis prédit, jamais il ne voyagea plus loin que ces ruelles sombres, dans lesquelles la pluie s’acharne à faire rutiler le moindre rayon des lampadaires, créant d’incessants jeux d’ombre et de lumière. 
Peppino Lo Cicero déambule, perdu dans ses pensées mi nostalgiques, mi terre-à-terre, faisant le bilan d’une vie qui semble être arrivée au bout du rouleau : « J’ai vécu comme on boit un alcool trop fort. On avale, on sent que ça décape, mais on n’est pas certain d’avoir compris le goût que ça avait »… Tout tueur à gages soit-il, il nous ficherait presque le bourdon. Ah oui, on ne l’a pas précisé, malgré son charme fatigué, son imper à la Bogart, celui dont le nez (cyranesque) précède l’arrivée est un affreux jojo. Peppi (pour les intimes) fait partie des « gregari » comme on les nomme en italien, un de ceux que la Camorra charge des basses besogne. Donner la mort aura été son pain quotidien durant quarante années. Remarquez, il ne s’en plaint pas, il est assez fier d’avoir toujours été un bon travailleur, méticuleux, efficace, évitant bien des souffrances aux victimes désignées. Cet amour du métier, il l’a même transmis à son fils, prunelles de ses yeux. Il ne lui reste plus qu’à prendre définitivement sa retraite… Mais évidemment, un événement imprévu en même temps que douloureux, très douloureux, va l’en empêcher… 
Pour répliquer à l'événement en question – la douleur ayant très vite laissé place à la colère –, Peppi appelle à la rescousse son grand ami Totò, surnommé « le boucher » – tout un programme – et nos deux septuagénaires vont reprendre du service. Désormais il ne feront plus de quartier, il ne sera plus question que de vengeance, quoi qu’il puisse leur en coûter. Eux qui furent de dociles petits soldats vont se retourner contre leurs supérieurs qui ne respectent plus les règles. Le plus grand régal du film consistant à entrer dans le jeu de ces personnages très marqués, tout droit sortis de l'univers ultra-codé du polar mafieux. Toni Servillo, dans le rôle de Peppino, excelle, le rendant plus que crédible et étonnamment attachant, alors qu’il n’en mérite vraiment pas tant !
Bien que totalement fictionnelle, l’intrigue s’ancre en partie dans un réalisme très finement observé. Qui connaît Naples prendra plaisir à reconnaître Rione Sanità, Forcella, Porta Nolana, zones toujours livrées à la criminalité.