Mouchette

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Mouchette, une adolescente taciturne dont le père est alcoolique et la mère gravement malade, vit dans la solitude.
Un soir d’orage, alors qu’elle rentre de l’école, elle s’égare dans la forêt. Elle accepte l’hospitalité d’un braconnier, Arsène, qui abuse d’elle. En rentrant chez elle, Mouchette assiste à la mort de sa mère, sans avoir le temps de se confier à elle…

Vos commentaires et critiques :

Qui est Mouchette ? Tout d’abord, un personnage d’adolescente apparu sous la plume de Georges Bernanos au début de Sous le soleil de Satan (1926), puis revenu sous une autre version dans l’avant-dernier roman de l’auteur, Nouvelle histoire de Mouchette (1937). Ensuite, l’héroïne d’un des plus beaux films du cinéaste Robert Bresson. Mouchette, c’est un chardon poussé sur du fumier : une petite paysanne pauvre et furieusement solitaire, aux sabots crottés, aux frusques rapetassées et à la bouille crasseuse, qui déambule, farouche, dans une dégaine d’indocilité sauvage.
Difficile de résumer ce film de boue et de colère, sculpté dans l’humidité, la noirceur et le vent, qui fait tout sauf dérouler conventionnellement son histoire… Entre une mère à l’agonie et un père alcoolique, une masure mal chauffée et les bancs hostiles de l’école, Mouchette essuie des torgnoles, jette des mottes de terre sur ses camarades de classe, dit « merde » à ses parents et pleure parfois. Un soir, un braconnier ivre la violente à l’abri d’une grange : elle l’étreint et l’appelle son « amant ». Plus tard, une vieille folle lui lancera la phrase fatidique : « Et toi, Mouchette, as-tu déjà songé à la mort ? »
Bresson ne filme pas des situations, mais des gestes et des regards cadenassés les uns aux autres, dans la succession desquels se lisent les mouvements intérieurs des personnages. Il faut voir à ce titre la scène de chasse en ouverture, puis celle où Mouchette fait un tour d’autos tamponneuses, toutes deux extraordinaires : les trajectoires s’emballent dans un montage percussif d’une netteté vertigineuse… Et en retranchant toute intentionnalité du jeu de ses acteurs, le cinéaste touche à l’abstraction et, par là même, à l’universel…

 Mathieu Macheret