La Solitude du coureur de fond TP

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Par un soir d'hiver, à Notthingham, Colin Smith et son comparse cambriolent une boulangerie et s'enfuient avec la caisse. Le jeune Colin est arrêté et aussitôt envoyé en maison de redressement. Là, le directeur va vite découvrir ses talents de coureur de fond. C'est pendant ces longues courses solitaires que le jeune homme s'évade en rêveries, déroule le film de sa vie passée, avec ses douleurs familiales et ses joies amoureuses.

Révélation de l'année BAFTA 1963

Vos commentaires et critiques :

Colin Smith, est un des représentants des "angry young men". Écœuré par le contre-modèle absolu qu'incarnent ses parents à ses yeux, eux qui n'ont cessé de s'invectiver et de courir après l'argent toute leur vie, le jeune homme refuse de se soumettre au diktat social. Après avoir vu son père s'épuiser - littéralement - à l'usine pour un salaire de misère, il préfère encore le désœuvrement à un travail aliénant. Il va même jusqu'à brûler un billet de banque dans un geste quasi anarchiste. Et si c'est bien entendu pour son vol d'une boulangerie qu'il est placé dans un centre de redressement, c'est aussi pour son refus de courber l'échine. Paradoxalement, c'est en découvrant, une fois enfermé, son aptitude pour la course qu'il éprouve ses plus grands moments de liberté. Vite repéré par le directeur de l'établissement, il s'entraîne dans la perspective d'une compétition qui opposera les jeunes délinquants aux élèves bourgeois d'une école privée. Chemin faisant, Smith comprend que le rapport de force peut s'inverser en sa faveur car l'enjeu de la compétition est décisif pour le directeur.
Entrelaçant habilement deux temporalités - le passé de la "liberté" et le présent de l'enfermement -, Tony Richardson montre bien comment les injonctions successives de la société aboutissent à la décision finale du jeune homme. C'est aussi par la modernité de la mise en scène que le cinéaste réussit à bousculer les conventions d'un ordre établi britannique cadenassé. L'absence de linéarité du récit s'appuyant sur un montage très libre, inspiré par la Nouvelle Vague française, déconstruit intelligemment les codes de la narration et nous plonge dans les méandres de la psychologie du protagoniste. De même, c'est une caméra ultramobile, portée à l'épaule, qui filme au plus près les garçons sur le terrain de football ou pendant la tentative de mutinerie à la cantine : il n'y a dès lors plus aucune distance entre le spectateur et les personnages auxquels on s'identifie pleinement. Véritable révélation, Tom Courtenay est désarmant de naturel dans le rôle de Smith, ce garçon introverti et peu éloquent et pourtant si expressif. Une œuvre majeure à redécouvrir de toute urgence.